Se peut-il qu’au moment où la machine de guerre n’existe plus, vaincue par l’Etat, elle témoigne au plus haut point de son irréductibilité, elle essaime dans des machines à penser, à aimer, à mourir, à créer, qui disposent de forces vives ou révolutionnaires susceptibles de remettre en question l’Etat vainqueur ? C’est dans le même mouvement que la machine de guerre est déjà dépassée, condamnée, appropriée, et qu’elle prend de nouvelles formes, se métamorphose, en affirmant son irréductibilité, son extériorité : déployer ce milieu d’extériorité pure, que l’homme d’Etat occidental, ou le penseur occidental, ne cessent pas de réduire ?
(Gilles Deleuze, Félix Guattari, « Traité de nomadologie : la machine de guerre »,
Mille Plateaux, p.441, Minuit, 1997)