60 ETAGES
ASBL (33Revpermi)
« Une soirée deux
ambiances » pourrait-on dire de cet album où dans
une grande marmite rock primitive se jettent des dispositifs électroniques
et électroacoustiques qui coulent jusqu’au fond du
pot et remontent en bulles et faisceaux, jusqu’à
environner la vieille tambouille en fer d’un halo d’hologrammes
piquants et tournoyants, et les vivants qui boivent de ce bouillon
se mettent à parler avec la voix des morts, dans la grotte
résonnent les mots d’Allen Ginsberg, de Don Van Vliet,
puis l’on est tellement saoulé que l’on se
couche, les yeux fermés le nez dans la terre, creusant
la terre avec son nez pour échapper à des essaims
de guêpes qui rendent fou, oui la deuxième ambiance
c’est quand les électroacousticiens ont viré
les rockeurs et se déchaînent en festivals de sons
sortis du chapeau de Majax pendant que tout le monde se traîne
parmi des stéréos qui tanguent à en tomber
par terre (l’électroacoustique attire vers le sol,
est-ce que l’on écoute mieux vautré ? c’est
vrai que c’est pas évident de danser dessus mais
tout est possible y compris de danser des slows avec des fourmis)
(l’électroacoustique attire vers le sol car elle
vient de sous la peau et du centre de la Terre -gargouillis digestifs
et frottements sismiques, bâillements telluriques et ailes
péteuses, chorales de vers de terre, réverbération
de souterrains sans fin...-), et quand l’on croit enfin
émerger on ouvre les yeux dans un palais de miroirs, des
fragments de soi se reflètent dans toutes les glaces et
l’on n’y reconnaît personne, l’acoustique
s’est fondue dans le roc, final musique-cristal, kaléidoscope
scintillant, aveuglant, trop de lumière dans la nuit, trop
de lumière nuit, on ne comprend rien, on ne sait rien.
(M.R.)
[Chronique parue dans Peace
Warriors n°20, décembre 2002]
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